Face aux écrans, à tous les éléments toxiques qu'ils présentent pour les jeunes, la tribune ci-dessous montre que le chantier est immense ! Ne pas s'en saisir serait une faute éducative. Ecouter, débattre, travailler et continuer à mettre en oeuvre des actions à l'échelle du lycée semble essentiel ! Le lycée Armand David sera au rendez-vous de ce défi qui est celui de la santé mentale des jeunes et de leur bien-être !
TRIBUNE - Face au danger que représente la surexposition des jeunes au numérique, il faut décréter un état d’urgence contre les écrans, estiment l’ancien premier ministre et le pédopsychiatre, qui proposent une série de mesures concrètes.
Ancien premier ministre, Gabriel Attal est secrétaire général du parti Renaissance et président du groupe parlementaire « Ensemble pour la République ». Pédopsychiatre, Marcel Rufo est professeur d’université-praticien hospitalier.
Pour sauver notre jeunesse, attaquons-nous aux écrans Des jeunes enfermés dans leurs chambres, de plus en plus coupés du monde, vivant dans une bulle où toutes les informations, les images et les idées se ressemblent. Des jeunes qui souffrent, poursuivis par les insultes, les moqueries et le harcèlement, parfois jusque dans leur chambre à coucher. Des jeunes qui doutent de leur avenir, de nos valeurs, du futur de la planète.
Et une brutalité qui monte, verbale ou physique. Une brutalité comme seule échappatoire, car sur les réseaux sociaux la loi de celui qui parle le plus fort est toujours la meilleure. Voilà une réalité qui nous frappe et menace. Menace le lien social. Menace notre démocratie, en propageant les fake news, les contenus radicaux et complotistes. Menace la santé mentale de notre jeunesse, car toutes les études le montrent entre anxiété, dépression ou troubles du comportement alimentaires… la santé de nos jeunes est en péril. Et dans ce cataclysme sanitaire, la responsabilité des écrans est immense. Les adolescents passent entre 3h30 et 5h par jour devant un écran, et bientôt plus de temps devant leurs écrans qu’à l’école. Près de la moitié des adolescents de 15 ans ont des troubles du sommeil, et un tiers d’entre eux se réveillent la nuit pour regarder leur portable.
Des mesures importantes ont été prises. Mais face à la gravité de la situation, nous devons accélérer encore. L’état d’urgence doit être déclaré contre les écrans. Et qui dit état d'urgence, dit mesures radicales. Pour désintoxiquer nos jeunes, nous devons briser tous les tabous. Pour protéger, il faut d’abord détecter, c’est notre première urgence. Chaque jeune devra passer un entretien d'évaluation de son addiction aux écrans à 2 âges clés de leur développement : à leur entrée en 6ème, puis en 2nde. Il est indispensable de faire un état des lieux de la dépendance aux écrans. La deuxième urgence, c’est de limiter l’accès. Une commission d'enquête parlementaire est en cours sous l’impulsion de la députée Laure Miller, mais nous pouvons d'ores et déjà proposer quelques solutions radicales et de bon sens.
Pour limiter l’accès aux écrans, faisons respecter, vraiment, la majorité numérique. Il faut interdire purement et simplement l'accès des jeunes de moins de 15 ans aux réseaux sociaux. Nous n'avons plus aucune excuse, car les outils existent. De la même manière que nous avons imposé les vérifications d’âge pour les sites pornographiques, nous devons le faire pour les réseaux sociaux. Ensuite, pour les jeunes qui ont accès aux réseaux sociaux, c'est-à-dire ceux de plus de 15 ans et jusqu'à l'âge de 18 ans, mettons en place un couvre-feu numérique systématique. L'objectif est radical mais indispensable : fermer les réseaux sociaux de 22h à 8h du matin pour ces jeunes. Sans exception.
Pour lutter contre l’addiction, rendons aussi les plateformes moins attractives. Pour les 15-18 ans, après 30 minutes d’usage d’un réseau social, il devra passer en noir et blanc pour une heure au moins. C’est prouvé : les images en couleur provoquent la génération de dopamine et créent de l’addiction, les images en noir et blanc permettent de l’éviter. Enfin, nous proposons une autre mesure radicale mais absolument indispensable : limiter à une heure par jour l’accès aux réseaux sociaux pour les mineurs. Même la Chine le fait avec TikTok – pour une fois, inspirons-nous de ce que fait ce pays ! Chine où l’algorithme de TikTok n’est pas le même, preuve de la connaissance de la dangerosité de notre version de l’application. La troisième urgence, c’est de mettre les plateformes face à leurs responsabilités. Malgré les sommations, certaines refusent d’agir. Mais la course aux profits de quelques-uns ne peut pas passer avant la santé mentale de générations entières. Alors, là-encore : agissons. Créons un « addict-score » public, sur le modèle du nutri-score, pour évaluer le potentiel addictif des applications et des plateformes. Un autre modèle sera mis au point, intégré aux plateformes, qui devra envoyer des notifications et des alertes, en cas de consommation excessive.
De plus, l’addiction doit avoir un coût pour les plateformes. Le tabac et l’alcool sont surtaxés, mais on ne demande rien aux plateformes du numérique. Nous proposons donc que 2% des revenus des plateformes générés en France soient à un fonds dédié au financement de la recherche et de la prise en charge de la santé mentale. Enfin, disons-le franchement : il faudra peut-être aller plus loin encore avec les plateformes qui s’obstinent à refuser de coopérer avec nous. Alors, celles qui refuseront de protéger notre jeunesse devront être interdites, purement et simplement. L’enjeu est immense. Il s’agit de sauver la santé mentale de notre jeunesse. Il s’agit de protéger la démocratie, menacée par les bulles algorithmiques et la prime aux propos les plus extrêmes. Si nous ne faisons rien, les écrans et leurs contenus tueront notre jeunesse à petit feu et, à la fin, notre société toute entière. Alors déclarons l’état d’urgence contre les écrans chez nos jeunes.